Le lien entre entre Shanghai et Hangzhou? Versailles.
En parcourant cette semaine du design, dont l’événement le plus représentatif fut le Design Shanghai, une « design » artfair chinoise – d’ailleurs pas des moindres, puisqu’elle est considérée comme la plus importante de Chine – j’ai eu l’occasion de faire de la brasse coulée chez Louis XIV. Un Maison et Objet antico-baroque, dans lequel, une fois l’œil exercé (et l’autre complètement brûlé), j’ai déambulé avec amusement – accompagnée de ma ritournelle préférée et incontrôlable : « Ah quand même ces Chinois…« .
Après deux ans passés en Chine, j’ai encore et toujours des petits sursauts de ce genre, qui enclenche invariablement ce type de réaction. Chaque nouvelle expérience s’apparente (et c’est sans fin) à un kinder-surprise à plusieurs niveaux : une poupée russe de la stupéfaction.
Gigantisme, dorure éclatante, myriades de diamants en cascades, candélabres et lustres qu’on hésite à catégoriser : pacotille ou objet rare ? (comprendre : « On fait encore ça ici? »). Des kilomètres de tissus dont les motifs se réclament du lys (et autres arabesques florales non-identifiées et non-identifiables de toute façon)… Des milliers de curiosités surgies d’une autre époque. D’ères lointaines ou peut-être pas encore vécues, peuplées d’animaux de toutes sortes et qui ne savent pas vraiment ce qu’ils y font.
Bref, pour résumer l’ambiance de ce Design Shanghai: « Il faut que ça se voit ». Un rez-de-chaussée dédié aux fantasmes , des Chinois, certes, mais aussi des nombreuses enseignes venues de partout dans le monde. Par exemple, cet Italien au lit géant, sorte de triple king size en long et en large (objet qui a, mais c’est une autre histoire, fait resurgir mon fantasme d’une pièce-lit), auquel j’ai demandé « Mais… Pourquoi? » (traduction : « Quelle idée? Quelles substances consommez-vous? Ça marche les affaires? »), il m’a répondu tout sourire, « Mais il n’y a qu’ici que ce genre de choses plait et surtout se vend (euh… traduction : « Les Chinois n’ont pas de gout mais beaucoup d’argent » ?), du coup, on se lâche!« . Yeah.
Une bulle où des cinquantenaires tout feu tout flamme regardent, testent et achètent avec frénésie. Histoire de se reconstituer un bout de monarchie française chez eux. Tandis que les djeunes, eux, utilisent les stands comme décors d’époque pour leurs selfies. Tout le monde y trouve donc son compte.
Au premier étage, l’inscription « Collectible Design hall » (hall un peu difficile à trouver parmi tout ces faisceaux aveuglants) – m’a rassuré. De la collection, de l’édition limitée, de la création… J’ai entrevu l’idée, le mirage, d’un espace contemporain (j’entends, à proprement parlé, qui appartient à la même époque que moi), avec des objets de choix, élégants, innovants. Design, quoi. C’est mon côté parisien-bobo-luxe qui n’aime pas être déçu, et qui a quand même un côté goût-préformaté-avec-une exigence-qui-se-pose-là, et surtout, avec sa touche monomaniaque. Une parisian attitude, souvent hautaine, la plupart du temps pénible, dont la triste conséquence est en général une sentence telle que: Se faire surprendre est compliqué quand on a bon goût.
Trève de narcissisme, le design contemporain chinois m’a interloquée. Positivement interloquée. Pas avec ce que j’ai vu dans ce hall – trop faible représentation de ce qui se fait à travers la Chine, et c’est franchement dommage – mais avec les personnes que j’y ai rencontrées, et qui m’en ont parlé avec passion. ET qui m’ont fait découvrir des designers, issus de 3 générations différentes, dont j’ai adoré les œuvres et l’esprit. Je partage quelques images, mais un article plus complet est à venir sur ce sujet, so, stay tunned :
Après cette baignade au pays du Roi-Soleil, direction Hangzhou avec Grand Arbre, à la base pour se reposer, se ressourcer, se poser, se déposer. Vaste programme dans une ville de 10 millions d’habitants. Oui, j’avais bêtement oublié, qu’on ne serait pas seulement deux à avoir la même idée en ce premier week-end de printemps. Alors évidemment, la petite retraite au bord du lac, les ballades inspirantes dans les plantations de thé, se sont plutôt fait entre amis, qui sont tous venus avec voitures, cars, mini-bus, hauts-parleurs et hauts talons, pour crier et rire aux éclats avec nous.
Cependant, en s’écartant des sentiers battus (et oui, talons aiguilles et chemins de terre escarpés ne font pas bon ménage) on retrouve un calme olympien, même si on a pleinement conscience qu’en Chine, c’est comme le concept du présent : il t’échappe sans cesse, il n’existe pas vraiment. On a donc commencé l’ascension d’une montagne tout en philosophant sur le silence et le sens de la vie, pour quitter la grande teuf organisée sur la route, et le côté terre à terre de tout ce vacarme.
Et c’est à ce moment, au détour d’un sentier quasi-abandonné, qu’on s’est invités chez Marie-Antoinette version chinoise (une amie m’a dit : « C’est tout à fait le style Sino-Marie-Antoinette » ), et bien oui, je n’aurais pas trouvé mieux pour décrire ce salon de thé.
Lu Ming Tang, c’est une marque de cosmétique faite à base de thé (cultivé dans les plantations à proximité) dont les expats raffolent (non, ceci n’est pas un placement de produit). La marque à donc ouvert son salon de thé (un spa ça aurait été cool, si je puis me permettre), un endroit curieusement désert et assez relax… on s’imagine plutôt bien y passer des lundis.
Un espace zen loin des clameurs de la foule.
Hangzhou, c’est aussi la ville du design culinaire.
et celui du hairstyle.
J’ai remarqué qu’à chaque événement (le week-end en étant un) ou lieu de tourisme/vacances (lac, semblant de campagne, fausses-vieilles-villes), il se passe un truc avec les accessoires pour cheveux : couronnes de fleurs, poussins en épingle, et là mini ventilo… Un vrai business. En chine, on s’amuse, on se déguise, on design sa vie quoi.
Bref, on a bien ri. On a quitté Hangzhou le lendemain, sous la pluie, en traversant d’étranges tunnels, pour rejoindre Shanghai. Notre fuite de Varennes.